Dur, dur d'être un Rayquaza [Libre et Soutenu]

Nathanaël se posa doucement sur l'herbe émeraude. Il examina les lieux. Une plaine traversée par un cours d'eau étincelant. Des fleurs partout, un paysage verdoyant. Où avait-il atterri ? Il ne connaissait pas cette île. Nath connaissait Hoenn, Sinnoh, Johto, et Kanto, ses aînés lui en avait parlé et en les survolant, il avait facilement su les reconnaître. Néanmoins, il n'avait pas voulu s'y arrêter. Trop proche d'Arceus et de ses larbins, trop proche des humains. Il voulait avoir la paix. Une île isolée au beau milieu de l'océan était donc idéale. Nath espérait juste qu'elle n'était pas trop peuplée. Il soupira. La vie qu'il menait jusqu'ici était tout simplement détestable. Se faire rabâcher les mêmes paroles cent fois par jour (Légendaire blablabla Responsabilités blablabla Tous les Pokémon blablabla Devoirs blablabla Rayquaza blablabla), se voir forcé à porter un fardeau trop lourd et dont on ne voulait pas, ne plus arriver à respirer au milieu de tous ses aînés trop exigeants, aussi compréhensifs qu'un navet, insupportables. Arceus lui avait accordé un temps de repos, lui ordonnant de revenir avant deux mois. Mais quel idiot, quel idiot ! Même dans ses rêves, Nathanaël ne reviendrait jamais ! Il ferait ce qu'il voudrait, car enfin il était libre. La liberté, c'était tellement merveilleux... Il n'en revenait pas d'en avoir été privé durant toutes ces années. Une bouffée de haine l'envahit lorsqu'il repensa à Arceus et ses larbins. Il ne voulait plus jamais les revoir. Palkia, Ho-oH, et tous les autres... Ils allaient être drôlement surpris, lorsqu'ils comprendraient enfin que Nathanaël était parti pour toujours. Le Rayquaza éclata de rire malgré lui. Et ils ne savaient même pas où il se trouvait ! Car Nath' doutait qu'ils sachent où se situait cette île. Il allait enfin pouvoir vivre comme il l'entendait...

Étrange, il n'y avait pourtant personne ici. Peut-être que les Pokémon se cachaient, effrayés par son apparence. Tant mieux. Nathanaël ne voulait pas être dérangé. Il se déplaça jusqu'au cours d'eau et but à longues gorgées, assoiffé par son si long voyage. Une fois désaltéré, il observa attentivement les alentours pour trouver une éventuelle proie. Chez ses aînés, ils ne se nourrissaient que de cadavres et de baies. Mais ici, les cadavres ne devaient pas être nombreux... Et Nath devait avouer que la viande fraîche l'attirait plus que de la charogne. Il finit par entendre des bruissements, et se dressa lentement, pour repérer la source du bruit. Et il la découvrit. Un Rattatac qui essayait de se mouvoir discrètement dans un buisson... Nathanaël envoya un Dracochoc pour l'assommer et s'approcha de sa proie, l'achevant d'un coup de griffe. Enfin, il allait pouvoir se reposer, désaltéré, le ventre plein, libre. Presque heureux, il commença à manger avec appétit. Une fois son repas terminé, il enterra les os du Pokémon et, balayant les environs du regard, tenta de trouver un coin d'ombre pas trop petit pour lui. Il était un Rayquaza tout de même. Il finit par trouver son bonheur, sous plusieurs arbres côtes à côtes. Ainsi il s'allongea, la tête au sol. Enfin, il avait la paix... Nathanaël, épuisé par son long voyage, bascula dans le sommeil.

Il se retrouva face à Ho-oH, au dessus des nuages. Il tentait d'attaquer le maître des Arcs-en-ciel qui avalait purement et simplement les attaques de Nath, en ouvrant son bec. Le Rayquaza se trouvait dans un état de rage incontrôlée et, avec de cris perçants, tentait de blesser Ho-oH. Finalement, ce dernier se décida à riposter. Rayquaza tomba, chuta à travers le ciel et s'écrasa lourdement au sol.

À présent, il ondulait désespérément dans l'espace, tentant d'échapper à Palkia qui le poursuivait avec d'effroyables rugissements. Le Rayquaza évitait tant bien que mal les redoutables attaques dont l'accablait le maître de l'espace, mais sentait l'épuisement le gagner, inévitablement. Il fut alors tout simplement détruit par un terrible Spatio-Rift.

Et voilà qu'il se battait contre Arceus. Se déchaînant, il envoyait les attaques les plus puissantes qu'il connaissait. Mais son créateur les renvoyait vers lui d'un coup de patte, tous les Légendaires derrière lui, qui toisaient Rayquaza d'un air menaçant et haineux. Ce dernier finit par s'écrouler au sol.

Nathanaël se réveilla alors en sursaut, ruisselant de sueur. Des cauchemars ! Heureusement, il avait rêvé. Le Rayquaza se renfrogna. Même dans ses rêves, Arceus et ses larbins l'ennuyaient. Contrôlant comme il le put sa colère naissante, Nath se déplaça jusqu'à pénétrer dans le cours d'eau. L'eau fraîche lui fit du bien et il revint sous les arbres en lévitant. Là, il laissa son regard errer sur la plaine. Certains Pokémon sortaient timidement des fourrés, puis y bondissaient lorsqu'ils apercevaient Nathanaël. Ce dernier ne leur accorda pas plus d'attention, poussant un soupir de lassitude. Il constata que les Pokémon oiseaux étaient toujours perchés sur leurs arbres, évitant d'observer Nath. Ce dernier eut un sourire ironique. Ils croyaient réussir à cacher leur peur ? Piafs imbéciles ! Arceus avait dut être malade, le jour où il avait créé tous les Pokémon. Et tant de créatures insignifiantes proliféraient... Pourquoi la majorité des Pokémon lui semblait stupide ? Pff. Arceus n'était pas si divin que les gens le croyaient. Nath ne savait même pas s'il était vraiment immortel. Il espérait que non. Ras le bol, de ce vieux papy céleste. Qu'il laisse la place aux jeunes. Un vieillard sénile s'était occupé de la création des Pokémon, n'était-ce pas scandaleux ? Voilà pourquoi le résultait pouvait parfois paraître désastreux.

D'ailleurs, même les Légendaires étaient consternants. De vrais petits toutous au service de ce vieillard céleste. À croire qu'ils n'avaient pas de volonté propre. Arceus leur avait-il fait subir un lavage de cerveau ? Lorsqu'il s'était occupé de les créer, les avait-il conçu pour servir ? Lui, Nathanaël, n'avait pas accepté de se soumettre. Arceus l'avait peut-être créé mais Nath ne lui appartenait pas. Il n'était pas de ceux qui s'inclinaient et approuvaient tout sans poser de questions. Il voulait être libre, et inférieur à personne. Il ne voulait rendre de comptes à personne. Il ne voulait pas être redevable. La liberté était ce qui existait de plus précieux, d'après le Rayquaza rebelle. Il refusait de devenir un pantin dont les ficelles étaient tirées par un Pokémon n'ayant plus toute sa tête.

Nathanaël se surprit à grogner et se reprit. C'est bon, il fallait se calmer. Arceus et ses larbins étaient à des kilomètres de lui. Il ne les reverrait plus jamais. Il était libre ! Alors il fallait cesser de penser à eux. Sinon, il allait pourrir sa nouvelle vie. Alors, bye-bye le papy céleste, bye-bye les pantins endoctrinés. Qu'ils aillent tous se faire voir, pensa Nath.

Le Rayquaza décida d'aller demander le nom de l'île, bien qu'il ne tenait pas spécialement à aborder l'un de ses habitants. Il n'avait pas besoin d'une réaction démesurée comme ces créatures en avaient le secret lorsqu'ils rencontraient un Pokémon Légendaire. Nathanaël se tourna lentement vers les oiseaux et ricana. Tiens, comme ils semblaient si courageux, ces piafs, pourquoi ne pas aller leur demander à eux ? Le Rayquaza s'éleva dans les airs et se dirigea vers leurs branches. Il approcha un Pijako :

Je veux savoir le nom de l'île.

Le Rayquaza ne parlait pas beaucoup, et ne daignait pas s'exprimer plus que cela lorsqu'il prenait la parole. Nath détestait le bavardage inutile. Ce domaine où, malheureusement, les Pijako étaient rois. Tant pis. L'oiseau se figea et tenta de dissimuler son trouble et sa peur. Peine perdue. Nathanaël l'avait déjà percé à jour.

Bien le bonjour, puissant Rayquaza ! La certitude de votre présence éclabousse mon cœur d'une gaieté empreinte de grandeur. La fierté de vous assurer l'information du nom est infinie et je vous déclare solennellement et avec dignité la bienvenue sur la terre paradisiaque de Seikan !

Nathanaël avait déjà mal à la tête. Il fixa un instant le Pijako, excédé. Un terrible bavard, hypocrite en plus. Gaieté ? Fierté ? Oh non, il était juste effrayé, pas gai, ni fier. Le Rayquaza n'était pas dupe. Il hocha la tête, et se retourna sans daigner saluer ce curieux Pokémon. Il ne voulait plus l'entendre, de toute façon. Il espérait que les habitants de... Seikan n'étaient pas des abrutis tel ce Pijako. Ce serait bien dommage, et surtout, consternant. N'y avait-il pas des personnes que Nath pourrait apprécier ? D'accord, il était solitaire, mais avait besoin de connaître des Pokémon avec qui il pourrait bien s'entendre, lui qui avait passé sa vie à attaquer les créatures qui étaient à ses côtés. Quand même, il n'était pas le seul être censé du monde. Quoique, si déjà les Pokémon Légendaires étaient des abrutis, qu'en était des créatures sans légende... ? Le Rayquaza ne savait pas s'il fallait espérer ou désespérer. Il soupira et se posa sur l'herbe, attendant, sans savoir pour quoi.

Matin tranquille aujourd'hui... Je coure à perdre haleine entre les arbres, m'éloignant de plus en plus de mon repaire. De toute façon, je retrouve toujours mon chemin. Et puis, si je me paume, c'est pas grave. L'île est à MOI ! Rien qu'à MOI ! Et c'est personne ni quelque chose qui pourra me détrôner ! Je suis la reine des misères et de ce paradis !
Je ne sais même combien d'endroits ou de végétaux m'appartiennent ! C'est trop dur de compter jusqu'à dix...

Un Persian qui passait à côté de moi feula soudainement en me reconnaissant. Je secouai la tête avec malice. Qu'il est bon d'être connue ! Aucun Pokémon pourra se mettre sur mon chemin ! Je suis libre ! Libre comme l'air ! Et oui, j'suis une Absol de compèt' ! Je saute par-dessus un rocher qui me bloque la voie. Ahah ! Trop facile ! Z'avez vu comment je suis forte ?

Entre les arbres, j'aperçois soudainement la sortie de ma forêt. Je ralentis en plantant mes griffes dans la terre meuble pour observer le paysage qui s'étale devant moi. Une magnifique plaine d'herbe verte, secouée par une brise fraîche. Une rivière sinue parmi tout ça et ce sont mes arbres qui entourent ça ! Alors ça aussi c'est à moi ? Cool ! Je vais pouvoir courir partout, partout, partout ! Et chasser ces piafs de Pijako !

Le vent ébouriffe mon poil. La langue pendante tel un chien qui joue avec un bâton, je regarde tout ce qui m'entoure. Ou plutôt tout ce qui M'appartient. L'excitation emplissait mon coeur, tel une liqueur sublime et veloutée. Là ! Cet arbre ! Maintenant c'est à moi ! Cette rivière, entre ce caillou et ce buisson, ça M'appartient et là ce... Mais... MAIS ! Que fait ce sale reptile vert sur MON territoire ?...

Je gronde en bandant mes muscles noueux. Mon corps se tend, je suis prête à attaquer. Je m'approche prudemment parce que ce Pokémon est énorme, gigantesque ! Je n'en ai jamais vu de semblable, et puisque personne ne m'a donné d'éducation et que j'ai réussis à survivre toute seule, je ne sais pas du tout de quoi il s'agit.

Je sais que j'appartiens à une espèce qu'on appelle Pokémon et que moi je suis une Absol. Je sais aussi qu'il y a des méchants tout roses sans poils qui marchent sur leurs pattes arrières et qui capturent des Pokémons. Mais on m'a aussi raconté qu'on n'en voyait pas souvent ici. Tout ça je l'ai appris grâce à des Pokémon qui ne violent pas mon espace et respectent mes règles. Il y a vraiment des gens bien dans ce monde !

Je baisse la tête tout en gardant un œil sur ce machin vert et trèèèès long. Je demande en grognant :

-Déclinez votre identité. Que faîtes-vous sur mon territoire ? Que faisez-vous sur le territoire d'Atrash ?

Cette bestiole ne me fait pas peur. Jamais je ne laisserais quelqu'un fouler de ses pattes, ses nageoires, ses ailes, ce qui M'appartient ! Je me battrais, même si l'ennemi est plus fort que moi. Je découvre mes crocs pour paraître plus menaçante. Roar ! La tigresse va entrer en scène ! Je vais lui déchiqueter la peau ! Je vais en faire du cuir de Mascaïman ! Je vais m'en faire une moquette, un tapis, un paillasson, une peluche, une.... Heu, je sais plus ce que je voulais dire ! De toute façon, le but principal, c'est que ce monstre va morfler ! Tu vas goûter à ma colère ! C'est MOI la plus puissante ! Et personne d'autre !

Allez viens reptile ! On va régler nos comptes tous les deux ! C'est MON île ! Et pas la tienne

Spoiler:

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